Arrivée à la Somone
C’est notre premier voyage au Sénégal. Accompagné de ma femme (Marina) et de mes parents (Alain et Colette LE FEBVRIER), nous nous laissons diriger par les expérimentés Patou et Thérèse SOURGET, la présidente de l’association Komiguea.
Dès notre arrivée à la Somone on sent une certaine décontraction. Sur la plage, le temps s’arrête pour faire sécher les poissons sur les étals de bois pendant que les enfants jouent sur la plage. Après quelques minutes, comme nous autres « Toubab » ne passons pas inaperçus, les enfants se rapproche. Le contact se fait rapidement et ils commencent à offrir des coquillages à Marina qui s’inscrit en madone du moment. Très tactiles, les enfants cherchent à nous tenir la main, s’agrippent à nos bras et nos jambes, et adorent poser pour les photos.
Nous entrâmes ensuite en discussion un des pères des enfants et observons l’arrivée de 2 bateaux en retour de pêche. Des pêcheurs nous disent bonjour, et créent le contact instantanément. Ils sont ravis d’apprendre ce que nous faisons ici suite aux explications de Patou.
De retour au village, des zébus déambulent calmement en ville sans jamais se laisser perturber par les scooters ou les taxis clando. Et si vous n’avez jamais vu un ruminant brouter du carton, sachez que ces animaux savent très bien trier le plastique ! Nous apprendrons plus tard que, le soir, le troupeau rentre dans ce qui lui sert d’étable pour obtenir des concentrés, et que par manque de fourrages l’été, le carton sert alors de fibre pour la rumination.
La famille Ndiaye à Joal
Nous arrivons à Joal en fin d’après-midi, et à force de flâner dans les rues, Patou pense que nous nous trouvons tout près de chez Ndeye, la mère de Mame Diarra et Coumba. Il demande alors aux passants où se trouve Ndeye et on lui indique alors l’homme qui est le père des deux filles, et qui marchait 100 à mètres de nous. Ici tout le monde se connait, et les discussions au coin des rues vous amène plus rapidement à destination que Google maps . En 5 minutes nous voilà en présence de Ndeye qui prend instinctivement « Maman Thérèse » et Patou dans ses bras pour un gros câlin. En observateur, presque gêné par l’émotion qui se dégage de cette scène, nous comprenons rapidement, l’immense attachement qui lie la famille Ndiaye à la famille Sourget (Patou et Thérèse). Et comme pour nous intégrer dans cette joie de retrouvaille, Ndeye vient ensuite nous offrir à nous aussi un câlin, et prend le temps de connaitre nos Prénoms, de savoir les prononcer, et de comprendre nos liens de parenté.
Après avoir pris quelques nouvelles de leurs familles respectives, et sans avoir le temps de nous remettre de nos émotions, Ndeye nous invite au Baptême célébré en ce moment même dans de minuscules ruelles et une placette entre les petites maisons de la famille Ndiaye. Nous comprenons effectivement que la grande famille Ndiaye s’est concentrée dans un petit quartier de Joal. Gênés de nouveau par cet accueil inattendu, nous voilà au beau milieu d’une fête de Baptême entourée de personnes inconnues en dehors de Ndeye bien sûr. Cette dernière nous présente alors à sa famille et un des Messieurs Ndiaye présent nous expliquer l’histoire de la famille et prend le temps de faire de l’andragogie pour occidentaux sur la définition des frères et des cousins au Sénégal . Il nous inculque aussi la normalité de la « famille élastique », certainement dans le but de nous ouvrir à la compréhension des liens de parenté complexes de toutes ces personnes présentent au Baptême. Ou alors, tout simplement nous faire accepter notre incompréhension tellement il y a de ramifications plus ou moins nettes entre toutes ces personnes. Voici un lexique simple de ce que nous avons pu retenir :
Au Sénégal En France
Frère même Père, même Mère Frère
Frère même père ou même mère seulement Demi-Frère
Frère Cousin ou aucun lien de parenté
Cousin Cousin éloigné
Pour se détendre avec un peu d’humour, nous avons pu dire à chaque homme que nous avons rencontré : « Vous êtes bien Mr Ndiaye ? » Ce à quoi la réponse fut « Oui » à chaque fois . En présence de Boubacar, petit-fils de Ndeye et fils de Mame Diarra, il est vite devenu notre chouchou, tout le monde le prend dans les bras et la famille est heureuse de partager son bonheur.
Plus tard nous rencontrons Mame Diarra et Coumba qui sont surexcitées de retrouver leu « Maman Thérèse » et leur « Papa Patrick » ! Nous pouvons définitivement le dire, Patou et Thérèse font partie de la famille Ndiaye et inversement. Les retrouvailles sont chaleureuses et ils ont beaucoup de choses à se raconter ! Quel bonheur de voir des relations humaines si profondes dépassant allègrement toutes disparités culturelles.
La famille Mbengue à Joal
Avec Marina, nous sommes très fières de connaitre Mathy Mbengue. Studieuse et dotée de bonnes capacités d’apprentissage, Mathy obtient de très bons résultats scolaires. Jusque-là, nous avons vu Mathy en photo et en vidéo grâce aux précédents voyages de l’association. Mais en dehors des correspondances écrites, nous n’avons jamais eu de contacts directs. Sachant notre venu, sa famille nous invite à manger un midi et nous sommes impatients de la rencontrer. A notre arrivée, nous entrons dans une petite cour bordée de maisons sommaires. Mathy est élevée seule par sa tante qui n’a pas d’enfants. Sa mère vie sur Dakar à l’année, mais elle a fait le déplacement pour être présente lors de notre venu. Par respect pour la tante de Mathy qui s’en occupe quotidiennement, la mère de Mathy est extrêmement discrète et reste en retrait lors de nos échanges et lorsque nous prenons des photos avec Mathy. Les femmes se sont faites belles et sont habillés comme pour les jours de fête. En réalité, notre venu est une fête. La famille Mbengue a loué de la vaisselle et des couverts pour nous offrir un délicieux Thiebou Dieune ! La famille n’utilisant habituellement pas de couverts, et le Thiebou Dieune étant un repas relativement cher, nous nous sentons encore une fois gênés par l’hospitalité incroyable qui nous est réservée.
Ce fut l’occasion pour nous de discuter avec Mathy, qui, malgré sa grande timidité à pu nous partager sont rêve de devenir Docteur ou même Chirurgienne. Nous la félicitons pour son ambition et lui glissons que nous en sommes ravis et que croyons en elle pour cela. Ça serait un beau clin d’œil à l’histoire si des Toubabs pouvais aider des Sénégalais à devenir des Toubibs 😉 (qui est l’étymologie du mot « Toubab »). Assouvi de partages humain comme de nourriture, nous quittons la famille Mbengue le cœur léger car nous savons que nous allons retrouver Mathy et sa tante le lendemain pour une cérémonie avec tous les enfants de l’école de Joal.
La cérémonie des enfants de Joal
Maurice Ngom, ancien directeur d’école, est notre contact local permettant de trouver de nouveaux enfants en besoin de scolarisation. Pour notre venu, il a organisé une cérémonie financée par l’association afin que nous puissions rencontrer l’ensemble des enfants de Joal. Après un discours d’introduction et de remerciement de Maurice envers l’association, nous distribuons des cadeaux aux enfants et prenons des photos à destination des membres qui ne sont pas du voyage. Mathy vient ensuite faire une belle allocution de remerciement qu’elle a écrit elle-même, puis lance un chant en l’honneur de Komiguea, suivi par l’ensemble des enfants. C’est enfin Coumba qui réalise une nouvelle fois un discours de remerciement. Entre la jeune Mathy et Coumba il y a 8 ans d’intervalle, ce qui montre une nouvelle fois l’inscription de l’Association Komiguea sur la durée. Et pour que la fête continue, se les femmes lancent des chants et s’ambiancent en nous entrainant dans la danse ! Des moments magiques où les sourires se portent sur tous les visages.
La cérémonie des enfants de Diouroup
Nous sommes chez Maurice à Diouroup, où nous avons séjournés, et où la cérémonie va se tenir dans la cour. Les enfants et leurs accompagnant arrivent au fur et a mesure. Alain et Colette vont alors pouvoir rencontrer le petit Fallou Diouf. Maman (Colette) pense alors le reconnaitre et lui demande si c’est bien lui ? Et comme pour ne pas décevoir, le petit répond que « Oui ». Mais après quelques minutes tout le monde éclate de rire en comprenant le Quiproquo ! 😊
De même qu’a Joal, la cérémonie se déroule avec les discours, les chants, les remises des cadeaux des parrains, les photos, et de nouveau des chants. Cette fois, l’ambiance va être encore plus exaltante grâce a 2 femmes qui ont apporté son propre instrument à percussion. L’une est venu avec une branche de bois et un bidon en plastique, l’autre qui est Marie, la grand-mère d’un enfant, positionne des cartouches de fusil au bout de ses doigts qu’elle frappe contre une calebasse sèche. C’est alors que Rocky entre en scène, un vrai Woman Show qui nous entraine tous à danser sur une séquence musicale courte qui se répète pour chaque danseur en mode « battle ». Cette danse se termine toujours en un jeté de postérieur vers l’arrière, ce qui fait hurler de rire les enfants lorsqu’ils voient les Toubabs imiter les expertes locales 😉.
Un ballon !
Dans les zones reculées où le passage des Toubabs devient plus rare. Le plus beau des cadeaux pour les petits garçons restera toujours le ballon de foot. Au jardin d’enfants Badette Lobry à Ndangane, pendant que les filles dansent au son des percussions, les garçons sont surexcités par l’arrivée du ballon ! Ils attendent tous impatiemment que nous finissions de le gonfler et une fois lancé au milieu de la cours, tout le monde le suis pour tenter de le botter nu pied dans l’anarchie la plus totale. En revanche, lorsqu’il arrive à mes pieds, tous le monde recul, et les enfants haletant attendent de voir ce que ce toubab va en faire. Lorsque je fais 10 jongles, je reçois une ovation comme jamais je n’en ai reçu en District ! 😉 Leur joie est tellement communicative, qu’en repartant essoufflé de cette école, j’ai les zygomatiques crispés de bonheur.
L’ile de Sakhor
La mangrove du Sine Saloum est aussi magnifique qu’apaisante. Je n’avais jamais imaginé qu’un paysage sans relief puisse dégager une telle beauté. Mais après la balade touristique, c’est sur une ile sableuse que nous allons désormais nous rendre. Au Nord-Ouest du Delta du Saloum, nous partons de Faoye pour rejoindre l’ile de Sakhor, l’endroit le plus reculé de notre voyage, inaccessible en véhicule lors de la saison des pluies. Une fois accosté, nous traversons une étendue de sable en charrette tractée par un cheval afin d’attendre le village. Eloignée de tout, cette ile est humoristiquement surnommée le « 6ème continent ». Au village, un bâtiment créé en 1964 s’est dégradé au fil du temps et était devenu inutilisable. Les habitants, Maurice, et l’association Komiguea ont donc œuvré pour en faire une école maternelle. Komiguea à financer la réfaction du toit du bâtiment. Les travaux se terminèrent le 2 Juin 2022, et les cours sont désormais dispensés par les femmes du village sans contrepartie de rémunération. A peine arrivé, les enfants nous entourent, nous tiennent les mains, les bras et ne nous lâchent sous aucun prétexte. Marina est la coqueluche des petites filles qui posent en photo avec elle. Après avoir visité la classe et félicité les enseignantes bénévoles, nous reçûmes les remerciements habituels. Enfin, nous rendons dans le village, rencontrer l’ancien aveugle que les insulaires considèrent comme leur patriarche. Il nous raconte l’histoire de son ile et nous remercie de ce que nous avons fait pour l’éducation des enfants.
Réflexion
Sinon nous n’avons pas de certitudes sur le fait que l’argent fait le bonheur. Il est en revanche certain que la connaissance donne de la liberté. La liberté de choisir, d’entreprendre, et de ne pas se mettre à la solde de personnes qui décide pour nous-même. C’est l’exemple de Maurice, qui, ayant reçus une éduction suffisante a pu transmettre en tant que professeur, puis directeur d’école et aujourd’hui à la retraite, en tant que porteur de projet. C’est aussi l’exemple de Daba, qui fut la toute première enfant connue par l’association, et qui est aujourd’hui devenu enseignante dans une école de Joal. Pour Daba comme pour l’association Komiguea, la boucle est bouclée, et nous œuvrons chaque jour pour multiplier ce genre de réussites.